La transition énergétique n’est plus une promesse lointaine, mais une réalité législative et fiscale qui impacte directement le portefeuille des Belges. Depuis l’été 2025, un changement majeur est entré en vigueur, redéfinissant les règles de l’installation des systèmes de chauffage : la fin du taux de TVA réduit pour les chaudières fonctionnant aux énergies fossiles.
Cette réforme TVA 2025, officialisée par la publication au Moniteur belge le 29 juillet 2025, marque un tournant décisif dans la politique de décarbonation du pays. En tant que propriétaire ou professionnel du chauffage, il est impératif de comprendre les tenants et les aboutissants de cette nouvelle réglementation pour planifier sereinement vos travaux de rénovation ou de construction. L’enjeu est de taille : le taux de TVA applicable sur ces installations a bondi de 6 % à 21 %, entraînant un surcoût significatif sur tout projet non validé avant cette date charnière.
Le Changement Radical : De 6 % à 21 % pour l’Installation de Chaudières Fossiles
L’annonce est claire et sans équivoque : le taux de TVA sur l’installation des chaudières alimentées au gaz ou au mazout (fioul) est désormais fixé à 21 %. Cette augmentation de 15 points de pourcentage s’applique à la totalité du projet d’installation ou de remplacement, et non uniquement à une partie des travaux.
Quelles Prestations Sont Concernées par la Hausse de TVA ?
Le législateur a défini avec précision le périmètre d’application de ce nouveau taux normal. Sont désormais soumises au taux de 21 % les prestations suivantes :
La fourniture de la chaudière : L’équipement principal lui-même, qu’il soit au gaz ou au mazout, est intégralement concerné.
La fourniture des équipements associés : Tout le matériel directement lié à l’opérationnalité de la chaudière neuve suit le même taux.
La pose et l’installation : Le service de main-d’œuvre effectué par le professionnel du chauffage pour installer ou remplacer l’appareil.
Le remplacement d’une chaudière existante : Même si vous remplacez un ancien modèle par un nouveau, l’opération est considérée comme une nouvelle installation et est soumise au taux plein de 21 %.
Fin de l’Exception pour les Logements de Plus de 10 Ans
Jusqu’à l’entrée en vigueur de la réforme TVA 2025, les habitations privées de plus de 10 ans bénéficiaient, pour de nombreux travaux de rénovation, du taux réduit de 6 %. Cette exception fiscale, qui visait à encourager la rénovation du parc immobilier ancien, n’est désormais plus pertinente pour l’installation des chaudières à combustibles fossiles.
Il est crucial de noter que cette mesure s’applique à tous les logements sans exception. Qu’il s’agisse d’une construction neuve, d’une habitation de moins de dix ans ou d’une demeure historique de plus de cinquante ans, l’installation d’une nouvelle chaudière au gaz ou au mazout entraîne l’application du taux de 21 %. L’ancienneté du bâtiment ne constitue plus un critère d’éligibilité au taux réduit dans ce contexte précis.
La Date Clé et la Clause Transitoire : Votre Dernière Chance au Taux Réduit
L’entrée en vigueur de la mesure a été instantanée dès sa publication officielle au Moniteur belge le 29 juillet 2025. Cette date est fondamentale et détermine l’application du taux de TVA sur votre facture. Cependant, le gouvernement a prévu une clause transitoire pour protéger les projets déjà en cours ou planifiés.
Conditions Stricte de la Clause Transitoire à 6 %
Pour bénéficier exceptionnellement de l’ancien taux de 6 % malgré l’entrée en vigueur de la réforme, vous devez remplir deux conditions cumulatives et non négociables :
Date d’Engagement Antérieure : Un contrat d’installation (devis signé) ou une facture d’acompte (premier paiement) doit avoir été établi et prouvé avant le 29 juillet 2025.
Date d’Achèvement des Travaux : Les travaux d’installation de la chaudière doivent impérativement être terminés au plus tard le 31 décembre 2025.
L’Importance Cruciale de la Preuve Horodatée
La seule manière de se prémunir contre l’application du taux de 21 % est d’être en mesure de fournir une preuve irréfutable de votre engagement contractuel avant la date butoir. La rigueur est de mise, car en l’absence de justificatif recevable, le taux plein de 21 % sera appliqué de manière automatique, sans possibilité de recours.
Voici les types de preuves acceptées par l’administration fiscale :
Signature électronique horodatée : Documentant précisément le jour et l’heure de l’accord.
Cachet daté sur le bon de commande : Une preuve physique de la date d’engagement.
Échange de courriel clair avec date : Une correspondance formelle et datée confirmant la commande.
Facture d’acompte émise avant le 29 juillet 2025 : La preuve d’un paiement effectué avant la date fatidique.
Attention : Un simple accord verbal, même s’il est antérieur au 29 juillet 2025, ne constitue jamais une preuve suffisante. De même, une visite technique ou l’établissement d’un devis non signé et non accompagné d’un acompte n’ouvre pas droit à l’application de la clause transitoire. Professionnels et particuliers doivent veiller à cette documentation avec la plus grande diligence. Si les travaux ne sont pas achevés au 31 décembre 2025, le nouveau tarif à 21 % s’appliquera sur la totalité de la prestation, y compris sur la partie déjà réalisée.
Ce Qui Reste à 6 % : Les Exceptions Essentielles à Connaître
Bien que la réforme TVA 2025 mette fin au taux réduit pour l’installation neuve de chaudières fossiles, trois catégories d’interventions et d’équipements conservent, sous conditions, le bénéfice du taux de TVA 6 %. Ces exceptions sont volontairement maintenues pour encourager soit la pérennité du parc existant, soit la véritable transition énergétique.
1. L’Entretien et la Réparation de Chaudières Existantes
Pour les propriétaires d’un logement de plus de 10 ans déjà équipé d’une chaudière, le taux réduit de 6 % reste applicable pour toutes les interventions d’entretien ou de réparation menées par un professionnel agréé.
Cette distinction est capitale : il s’agit de maintenir ou de remettre en état un appareil existant. La réparation consiste à remplacer une pièce défectueuse sans changer l’intégralité du corps de chauffe. Dès lors que l’intervention est un remplacement complet de la chaudière – même par un modèle identique – elle bascule sous le coup du taux de 21 %. L’entretien annuel (ramonage, réglages, nettoyage) n’est pas touché par la réforme et conserve son avantage fiscal.
2. La Fourniture d’Accessoires Non Spécifiques
Certains équipements de chauffage ne sont pas intrinsèquement liés aux combustibles fossiles et peuvent fonctionner avec n’importe quel type de système (pompe à chaleur, chaudière biomasse, etc.). Ces accessoires, considérés comme « non spécifiques » aux énergies fossiles, conservent leur taux de 6 % s’ils sont installés dans le cadre d’un projet de rénovation admissible, c’est-à-dire dans une habitation privée de plus de 10 ans.
Ces équipements incluent, sans s’y limiter :
Les thermostats intelligents ou programmables.
Les vannes thermostatiques.
Les radiateurs ou convecteurs.
Les systèmes de régulation de température généraux.
Il est important de noter la nuance apportée par le SPF Finances concernant ces éléments, notamment les thermostats, lorsqu’ils sont installés en même temps qu’une nouvelle chaudière fossile (voir section suivante).
3. Les Systèmes de Chauffage Durables : Le Taux de 6 % Maintenu comme Incitant
L’objectif principal de la réforme TVA 2025 est d’accélérer la sortie des énergies fossiles. Par conséquent, les alternatives écologiques et durables conservent et bénéficient pleinement du taux de TVA réduit à 6 %. Cette mesure fiscale est un puissant levier pour la transition énergétique belge.
Les systèmes qui restent éligibles au taux de 6 % incluent :
Les Pompes à Chaleur (PAC) de tous types (air-eau, sol-eau, etc.).
Les Chaudières Biomasse (fonctionnant aux granulés, pellets ou bois).
Les Chauffe-eau Solaires.
Les systèmes de chauffage Hybrides (combinant plusieurs technologies).
En conservant l’avantage fiscal sur ces installations, le gouvernement fédéral harmonise sa politique avec les primes et soutiens régionaux (Wallonie, Bruxelles, Flandre) qui encouragent déjà financièrement l’adoption de ces technologies. Le message est clair : l’État fédéral supprime les avantages indirects aux énergies fossiles pour mieux cibler et promouvoir les solutions d’avenir.
Le Cas Spécifique des Thermostats et Régulations : Une Confusion à Éviter
L’un des points de friction et de confusion fréquents concerne le sort des thermostats et des modules de régulation lorsque l’on procède au remplacement d’une chaudière. Alors que ces équipements peuvent être considérés comme “non spécifiques” (et donc potentiellement à 6 % s’ils sont installés seuls), leur taux de TVA change radicalement lorsqu’ils sont intégrés à un projet de remplacement de chaudière fossile.
Selon la Circulaire 2025/C/47, §32 du SPF Finances, les équipements de commande et de régulation installés en même temps qu’un système de chauffage alimenté par un combustible fossile font partie intégrante de cette installation et doivent donc être soumis au taux normal de 21 %.
Synthèse du Taux Applicable pour les Thermostats :
| Thermostat | TVA | Remarques |
| Thermostat remplacé avec la chaudière | 21 % | Il est considéré comme un élément spécifique du nouveau système. |
| Thermostat livré avec la chaudière | 21 % | Accessoire inclus dans l’installation principale. |
| Thermostat conservé | — | Pas d’impact, car il ne fait pas l’objet d’une nouvelle facturation. |
| Thermostat indépendant (posé seul) | 6 % | S’il est installé dans le cadre de travaux de rénovation admissibles (> 10 ans), il bénéficie du taux réduit. |
Cette nuance force les professionnels à être extrêmement précis dans leur facturation et les particuliers à bien comprendre que la modernisation de la régulation, si elle est concomitante au changement de la chaudière fossile, sera soumise au taux plein.
Pourquoi cette Réforme ? Objectifs Politiques et Transition Énergétique
La réforme TVA 2025 n’est pas une mesure isolée, mais s’inscrit dans un ensemble plus large de réformes fiscales ayant un objectif clair et ambitieux : orienter la Belgique vers une transition énergétique plus verte.
Une Volonté Politique de Sortir Progressivement des Énergies Fossiles
La décision de supprimer l’avantage fiscal sur l’installation des chaudières gaz et mazout est un signal fort du gouvernement belge. Il s’agit d’une incitation économique majeure pour les particuliers à se tourner vers des solutions de chauffage plus écologiques. En rendant les systèmes fossiles plus coûteux (via la TVA), et les systèmes durables plus avantageux (via le maintien du 6 % et des primes), les autorités cherchent à :
Diminuer la dépendance du pays aux combustibles fossiles, source d’instabilité géopolitique et de volatilité des prix.
Contribuer à la réduction des émissions de gaz à effet de serre, un objectif qui s’aligne sur les engagements climatiques européens et nationaux.
La mesure fait partie d’une loi-programme adoptée par la Chambre des représentants en juillet 2025, ce qui souligne son caractère structurant dans la politique climatique du pays.
Cohérence Fiscale avec les Soutiens Régionaux
La suppression des avantages fiscaux fédéraux pour les chaudières fossiles crée une cohérence fiscale bienvenue avec les dispositifs d’aide existants. Les Régions (Wallonie, Bruxelles, Flandre) allouent déjà d’importantes subventions (primes) pour l’installation de technologies durables comme les pompes à chaleur ou les systèmes biomasse.
En éliminant l’aide indirecte fédérale (TVA 6 %) sur les énergies fossiles, l’État s’assure que tout son arsenal fiscal et financier œuvre dans le même sens : promouvoir les alternatives écologiques et éliminer les soutiens, directs ou indirects, aux systèmes qui vont à l’encontre des objectifs climatiques.
Attention aux Abus Fiscaux : Les Pièges à Éviter (et la Responsabilité du Client)
Depuis l’entrée en vigueur de la réforme TVA 2025, certains installateurs peuvent être tentés d’user de pratiques douteuses pour maintenir artificiellement un prix plus bas ou rassurer leurs clients. Ces pratiques sont considérées comme des abus de droit fiscal et peuvent entraîner de lourdes sanctions, y compris pour le client final.
1. Le Forfait Main-d’œuvre ou Équipement Fictif à 6 %
Certains professionnels pourraient essayer de ventiler le devis de manière artificielle. Ils indiquent un taux de 6 % sur des postes qui ne sont pas réellement installés ou qui ne sont pas éligibles, comme des mentions pour la « régulation », les « vannes » ou le « chauffage au sol », afin de réduire le prix total TTC.
Conséquence : Cette manipulation est un abus de droit fiscal, passible d’une amende importante. Elle vise à contourner illégalement la nouvelle législation en faisant passer une partie du projet à 6 %, même si les éléments concernés sont spécifiques au nouveau système fossile à 21 %.
2. La Ventilation Fictive de la Main-d’œuvre
Une autre approche interdite consiste à laisser la chaudière au taux correct de 21 %, mais à appliquer le taux réduit de 6 % à un autre poste, comme la main-d’œuvre, pour compenser la hausse globale du prix.
Risque Juridique : L’Article 1, §10 du Code TVA donne le pouvoir à l’administration fiscale d’appliquer le taux le plus élevé (21 %) à l’ensemble de la facture lorsque ce genre de ventilation est jugé fictif ou abusif. Cela signifie que l’intégralité du devis peut être requalifiée à 21 %, avec l’obligation de payer rétroactivement la différence de TVA.
3. Le Faux Argument de Responsabilité de l’Installateur
Un installateur pourrait tenter de rassurer son client en lui garantissant qu’il prendra la responsabilité en cas de contrôle ou en affirmant qu’aucun contrôle n’aura jamais lieu. Ces affirmations sont trompeuses et dangereuses.
Rappel Fondamental : Le Client est Solidairement Responsable
En Belgique, le client est solidairement responsable du taux de TVA appliqué sur la facture. Si le taux réduit de 6 % est utilisé à tort, le client est tenu, au même titre que l’installateur, de rembourser la différence à l’administration fiscale, même si la facture a été établie par le professionnel. C’est pourquoi il est crucial, pour tout particulier, d’exiger des devis clairs, conformes et transparents avant de s’engager.
Recommandations pour Particuliers et Professionnels du Chauffage
La réforme TVA 2025 exige une réactivité et une rigueur accrues de la part de tous les acteurs du marché.
Pour les Particuliers : Anticiper et Vérifier
Réaliser un Diagnostic Énergétique : Avant de choisir un nouveau système, évaluez les besoins de votre logement et comparez les différentes options. L’augmentation des coûts pour les systèmes fossiles rend les pompes à chaleur et les chaudières biomasse (TVA 6 %) encore plus compétitives.
Vérifier la Clause Transitoire : Si vous avez signé un devis ou payé un acompte avant le 29 juillet 2025, assurez-vous que vous avez une preuve horodatée et que les travaux seront terminés avant le 31 décembre 2025 pour bénéficier du taux de 6 %.
Exiger la Transparence : Demandez des devis détaillés et vérifiez que le taux de 21 % est correctement appliqué sur l’installation de votre chaudière gaz ou mazout neuve.
Pour les Professionnels et Partenaires : Mettre à Jour et Communiquer
Mise à Jour des Outils de Facturation : Il est essentiel d’ajuster immédiatement tous les logiciels et documents pour appliquer les nouveaux taux en vigueur depuis le 29 juillet 2025.
Formation des Équipes : Le personnel commercial, technique et administratif doit être formé aux nouvelles règles de TVA, en insistant sur la distinction entre l’installation neuve (21 %), l’entretien/réparation (6 %) et la clause transitoire.
Rigueur Documentaire : La datation des devis signés et des preuves de versement d’acomptes doit être irréprochable et clairement horodatée pour tout projet souhaitant bénéficier du taux de 6 % dans le cadre de la clause transitoire. Une communication claire avec le client sur sa responsabilité solidaire est également cruciale.
Conclusion : Un Tournant Majeur Vers le Chauffage Durable
La réforme TVA de juillet 2025 est un jalon majeur dans la politique énergétique belge. En mettant fin au taux réduit pour l’installation des chaudières à combustibles fossiles, le gouvernement concrétise sa volonté d’accélérer la transition énergétique et d’orienter durablement les ménages vers des solutions plus respectueuses de l’environnement.
Si vous êtes en phase de projet, il est vital de vérifier méticuleusement votre éligibilité à la clause transitoire et de vous assurer que votre professionnel applique les taux corrects pour éviter un redressement fiscal. L’avenir du chauffage en Belgique est désormais plus cher pour le gaz et le mazout, mais plus avantageux et soutenu fiscalement pour les solutions durables à 6 %. C’est le moment idéal pour faire le choix de l’efficacité et de l’écologie.
